Tout le monde a droit à sa sexualité. C'est le Credo du Planning Familial et à Rennes, Laure Stalder est chargée de le mettre en application auprès d'un public spécifique : les personnes en situation de handicap.
Depuis quinze ans, elle s'adresse aussi bien à ces personnes directement qu'à leurs accompagnants, qu'il s'agisse des professionnels ou des familles. Elle anime des formations, des groupes de paroles et au besoin, invente les outils qui lui manquent.
Pour elle, le chantier est vaste d'autant que fin 2016, l'ADAPEI et le Planning ont signé une convention qui ouvre la porte à de nouveaux partenariats.
Trois questions à Laure Stalder, conseillère du Planning Familial de Rennes et Saint-Malo.
Quelles actions le Planning propose-t-il en direction du public porteur de handicaps ?
LS – Le Planning Familial est toujours intervenu auprès de tous les publics, ne faisant pas de distinction entre les personnes. Tout le monde a droit à sa sexualité quelle que soit la façon dont se présente sa vie. A Rennes, on a toujours accueilli des personnes handicapées seules ou en groupe, pour répondre à leurs questionnements. Il y a une quinzaine d'années les demandes ont augmenté notamment liées au sida. Ça nous a permis de nous reposer certaines questions. C'est aussi à ce moment-là que nous avons déménagé dans des locaux mieux adaptés et plus accessibles. Nous avons constitué un groupe de travail non seulement avec les conseillères et les médecins du Planning mais aussi des partenaires extérieurs et on s'est doté que quelques priorités : élargir notre public, communiquer davantage, proposer des formations aux professionnel-le-s et bien sûr répondre aux besoins des familles. On a aussi fait le constat qu'il nous manquait des outils et nous avons par exemple créé un jeu. Au niveau national, le Planning propose un livret « Handicap, et alors ? » qui s'inspire beaucoup des expériences vécues au Planning de Rennes qui fut précurseur sur cette question.
Quelles sont les spécificités de ce public ?
LS – Comme dans toutes nos interventions, nous parlons beaucoup d'amour, de plaisir, de désir. Des choses positives ! Mais nous parlons aussi de prévention (contraception, IST, Sida) et bien sûr des violences. Notre approche est toujours globale c'est-à-dire incluant tout l'environnement de la personne.
Avec les familles, c'est parfois difficile parce qu'il y a souvent beaucoup de surprotection de l'enfant handicapé. Pour les parents, leur enfant ne peut avoir de sexualité, c'est toujours leur bébé ! Nous devons leur faire comprendre qu'il peut avoir des désirs comme tout individu et que même ça fait partie de son épanouissement et de son projet de vie.
Nous travaillons beaucoup à partir de photo-langage sur tous les domaines : la connaissance du corps, de l'hygiène, la naissance des bébés... En fait, tout ce qu'on fait d'ordinaire mais en prenant plus de temps. Ça nous demande une certaine capacité d'adaptation ; ça se passe toujours sur plusieurs séances.
Comme les autres, les personnes handicapées doivent apprendre à dire « non », à exprimer leurs désirs ; c'est parfois difficile car elles sont plus vulnérables que les autres, souvent sans défense et la violence est forte y compris au sein des structures. Souvent – en particulier pour les déficients intellectuels – que se soit les victimes ou les agresseurs, il y a à la fois un manque d'information et une absence de verbalisation de ce qui arrive. Avant, on nous appelait comme des pompiers dans les établissements ; on préfère venir en amont. Avec mon collègue psychologue, nous animons des formations que nous souhaitons réduites, avec peu de participant-e-s et dans les établissements eux-mêmes (IME, ESAT, foyers de vie ou d'hébergement, etc.). On n'est pas dans de la formation théorique, mais plutôt dans de l'analyse de pratiques. C'est plus concret et ça correspond mieux à ce qu'attendent les professionnel-le-s. Après, nous les accompagnons sur de la mise en place d'un plan d'actions.
Que va changer pour vous la signature de la convention avec l'ADAPEI 35 ?
LS – C'est pour nous un gros chantier ; nous passons à une autre dimension ! Il y a déjà dix ans que nous intervenons dans certains établissements dépendants de l'ADAPEI, mais cette convention permet de formaliser nos actions. C'est une façon de redynamiser ce qui aurait pu commencer à s'essouffler et en même temps l'opportunité pour de nouveaux établissements de s'en emparer et de nous faire appel puisque ça concerne l'ensemble du département. Il est important pour nous d'être repérés au sein des structures et d'être visibles notamment pour les familles à l'occasion des réunions d'accueil, des portes ouvertes, etc.
Propos recueillis par Geneviève ROY
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