Aldijana Okeric a 22 ans et est étudiante en quatrième année de droit à l'université de Sarajevo. Elle est membre de l'association YIHR-BIH (Initiative de la Jeunesse pour les droits humains) créée d'abord en 2002 en Serbie puis en 2008 en Bosnie-Herzégovine par des jeunes qui aspirent à une société dégagée des courants nationalistes.

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En mars elle visitait la Bretagne à l'invitation du CCFD-Terre Solidaire, partenaire des actions menées par YIHR à Sarajevo.
Elle a témoigné de son engagement dans son pays pour que la paix puisse se construire sur une mémoire commune et une juste reconnaissance de toutes les composantes de la société.

« Je milite au sein de l'association depuis cinq ans. YIHR organise des rencontres et des échanges entre jeunes de 18 à 25 ans de communautés différentes et les invite à participer à des événements culturels et artistiques.
La Bosnie-Herzégovine a beaucoup souffert du conflit dans les années 90 ; notre but est aussi d'agir pour la vérité et la reconnaissance des responsabilités dans les crimes commis dans l'ex-Yougoslavie.

Notre première idée a été d'organiser le camp d'été de la paix afin de rouvrir le dialogue entre les différentes communautés. Nous essayons d'établir une présence dans les lycées parce que c'est extrêmement important aussi de parler aux adolescents.

Nous luttons avec force contre toutes les discriminations mais aussi pour des réformes législatives. Actuellement, nos responsables politiques insistent sur les clichés ethniques et les divisions du pays ; nous voulons changer le récit officiel et faire entendre notre récit à nous.

C'est la situation sociale et politique qui nous préoccupent. Nous voulons faire évoluer notre pays et le monde dans lequel nous vivons. Chaque année, nous organisons une université d'été pour parler aux jeunes des libertés civiles. Une de nos idées fondamentales est l'universalité de la condition humaine et du coup l'universalité des droits humains.

Aldijana

 

Nous sommes porteurs d'un certain idéalisme, nous en sommes conscients. Le fait que le respect plein et entier des droits humains reste inatteignable ne nous dérange pas vraiment car nous pensons qu'il faut insister pour que les droits humains ne restent pas simplement des mots. Nous avons fait pression notamment sur la municipalité de Sarajevo qui nous a permis d'ouvrir notre centre de jeunesse il y a deux ans.

L'égalité hommes/femmes est un sujet qui nous concerne aussi. C 'est une valeur que nous promouvons auprès de tous les jeunes qui viennent nous voir. Nous faisons aussi du lobbying ; nous avons notamment fait pression sur le gouvernement pour qu'il mette en place un quota de 30% minimum de femmes au sein du gouvernement.

La contraception ou l'IVG ne sont pas des sujets de grand débat en Bosnie-Herzégovine car la société demeure très conservatrice ; les causes féministes sont encore périphériques. Au niveau des salaires également, de grandes inégalités persistent. Hélas, on n'en parle guère que le 8 mars !

Pour l'instant, la science politique m'intéresse surtout sur le plan théorique ; je ne me vois pas devenir femme politique. Je trouve que pour faire évoluer la situation, c'est une meilleure idée de s'engager au niveau non gouvernemental ; ça nous permet une plus grande liberté d'action. Notre rôle est de faire pression sur le gouvernement par exemple pour faire évoluer la législation. Si on s'engage dans un camp politique, il faut être beaucoup plus prudent par rapport à ce qu'on dit. »

Propos recueillis par Geneviève ROY