Elle dit qu'elle a apporté « l'envie » tandis que lui arrivait avec « ses compétences techniques et son expérience ».

Le film documentaire  

Dessine-moi une féministe produit dans le Finistère est le fruit d'un travail de plusieurs années entre Galane, aujourd'hui lycéenne de seize ans, et son père Tanguy Alanou, documentariste.

Une aventure qui a permis à l'une de trouver des réponses à ses nombreuses questions et à l'autre de faire évoluer son regard. Avec l'envie pour les deux de faire un deuxième volet, mais... après le bac !

Film Affiche

« Après mai 68, après les lois Veil ou Halimi, on avait l'impression que le boulot était fait ». Tanguy Alanou le reconnaît bien volontiers, même s'il était « sensible à la question » le sujet du féminisme n'avait jamais auparavant traversé son travail de documentariste. Il a fallu qu'un jour, sa fille alors âgée de douze ans, lui suggère de réaliser un film. Elle souhaitait juste trouver des réponses à toutes ses questions : pourquoi des inégalités de salaire, pourquoi toutes ces violences, c'est quoi le patriarcat, etc. « Exister en tant que femme ça faisait une différence avec exister en tant qu'homme ; moi, je pensais que j'existais tout court » se souvient-elle devant la caméra.

« Je ne me sentais pas légitime à travailler là-dessus » raconte aujourd'hui Tanguy. Il répond donc à Galane : « d'accord, mais on le fait ensemble ! » Quatre ans plus tard, ce qui n'était qu'une boutade est devenu un film documentaire de 48 mn projeté en Bretagne et ailleurs et notamment auprès des plus jeunes qui ont l'impression qu'on parle enfin leur langage.

« Le cheminement de quelqu'un qui sort de l'enfance

et devient une femme »

En acceptant que la caméra de papa entre dans l'intimité de sa chambre et qu'elle apparaisse à l'image comme l'adolescente qui pose les bonnes questions, Galane incarne en quelque sorte tous.tes les autres jeunes de son âge. « Ils et elles reconnaissent leurs codes et peuvent se projeter » explique Tanguy heureux de contribuer ainsi à donner une autre image de l'adolescence.

Galane« On s'éloigne – défend-il – de la caricature de l'ado un peu ronchon qui passe son temps à glander. La chambre devient non pas un lieu où on s'enferme mais plutôt l'endroit où on se sent bien, où on peut écrire, dessiner, réfléchir, etc. »

S'il a fallu quatre ans pour que le projet familial devienne « une production professionnelle » diffusée dans de « vrais cinémas » c'est que le père et la fille ont dû s'organiser pour écrire et filmer pendant les vacances scolaires ou les week-ends. Et en même temps, tous deux estiment qu'il fallait ce temps-là pour que le projet devienne mature. Parti des questionnements d'une petite fille de douze ans, il se termine sur les convictions d'une lycéenne qui sait désormais qu'avant d'entamer un deuxième volet, il lui faudra passer son bac. « C'est – analyse le papa – le cheminement de quelqu'un qui sort de l'enfance et devient une femme ».

« Je me suis rendu compte que tout était imbriqué

dans un même système qui nous dépasse »

Pour répondre à ses questions, Galane a pris toute la place qu'elle souhaitait dans l'écriture du film. « On se complétait - dit-elle – Moi, je n'ai pas du tout de compétences techniques ou d'expérience, je ne sais pas trouver des financements, mais j'avais quelqu'un à côté de moi pour ça et j'apportais l'envie et l'écriture ». Tanguy confirme : « je cherchais des personnes ressources, on préparait les questions ensemble et elle prenait le rôle de l'intervieweuse ».

Pour plus de chaleur, les enregistrements se faisaient chez les femmes rencontrées, dans leur salon. Un « concept » que le réalisateur décrit comme « des rencontres très douces, dans la sororité, pas du tout quelque chose d'universitaire mais du vécu qui venait nourrir les réflexions de Galane et petit à petit les miennes ». Ces six femmes d'âges variés - comédienne, sociologue, journaliste, créatrice d'entreprise, étudiante, thérapeute - étaient toutes « très touchées de voir la démarche de cette adolescente ».

Galane AlanouPour le père comme pour la fille, la réalisation du documentaire a ouvert de nouvelles portes. « Pour moi, c'est une prise de conscience – assure Tanguy Alanou – j'ai dû me contronter à ma propre masculinité et paternité et enlever mes œillères pour interroger ma façon d'être dans mon couple, dans mes interactions avec mon entourage, mes collègues, etc. et être maintenant conscient de ce qui avant n'était pas remis en cause ».

De son côté, Galane Alanou a mûri. Ce qu'elle appelle sa « naïveté du début » s'est enrichi de nouvelles pistes de réflexion. « Je me suis rendu compte que tout était imbriqué dans un même système qui nous dépasse – dit-elle – et qu'il fallait élargir le féminisme à toutes les inégalités humaines et considérer de la même façon toutes les discriminations : racisme, transphobie, homophobie, classisme, validisme, grossophobie. On ne peut pas combattre les unes sans les combattre toutes ! »

Geneviève ROY

Prochaines projections publiques de Dessine-moi une féministe :
Samedi 8 mars à 17h au cinéma L’Image à Plougastel
dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes, en présence de Galane et Tanguy Alanou
Dimanche 9 mars en soirée au Cessonnais à Saint-Brieuc
dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes
Vendredi 14 mars à 20h au centre social Chemins de Faire à Rosporden

On peut aussi visionner le documentaire en replay sur les chaînes régionales TV Rennes, Tébéo et Tébésud