Partout dans le monde, quand un conflit éclate, les femmes en sont les premières victimes. Le Mali n'a pas échappé à cette règle.
Ce pays, dont pourtant les femmes ont toujours été vues comme des piliers de la société, a très rapidement régressé.
Hawa Deme, jeune Malienne de 29 ans, présidente de l'association des étudiants Maliens de France, témoignait à Rennes la semaine dernière lors d'une table ronde organisée par le Mouvement de la Paix.
Quelques extraits de son intervention.
« Aujourd'hui, partout dans le monde, les femmes sont de vraies armes de guerre parce qu'on préfère violer la femme, la mère ou l'enfant d'un ennemi sous ses yeux plutôt que de le transpercer d'une balle donc très souvent les femmes sont les premières victimes.
Le Mali est composé d'une majorité de femmes et elles ont toujours été en avant-garde de toutes les grandes batailles qui ont marqué l'histoire de notre pays que se soit du temps de la colonisation au moment d'acquérir l'indépendance et surtout dans l'instauration de la démocratie.
En 1991, ce sont les femmes qui étaient devant pour arracher la démocratie ; elles ont organisé des marches pour arrêter les massacres de leurs enfants. Ce sont des femmes battantes, des femmes militantes qui sont toujours là dans leurs familles, dans leurs communautés, à se battre au quotidien.
Suite au coup d'état de 2012 et à l'installation de groupes armés au nord du Mali, des groupes aux idéologies extrémistes ont voulu instaurer ce qu'ils appellent la Charia mais qui n'a absolument rien à voir avec l'Islam, religion de tolérance ; déjà, les femmes étaient les premières victimes. Chaque fois qu'il y avait des règlements de compte avec les hommes de ces endroits-là qui ne se laissaient pas faire, chaque fois qu'il y avait des mouvements de protestation, ce sont les femmes qui étaient mariées de force, ce sont les femmes qui étaient violées, ce sont les femmes souffraient dans leur chair.
Mais pendant toute cette période, les femmes se sont organisées ; elles communiquaient beaucoup, elles envoyaient des informations à celles qui étaient dans les zones non occupées. En France, la communauté Malienne très organisée d'un point de vue associatif, a pu mettre en place une grande solidarité (des marches de soutien, des collectes de denrées alimentaires ou de médicaments) et organisé le voyage de quelques femmes victimes de mutilations.
Nous avons assisté au Mali à une régression de la situation et du rôle de la femme dans une société historiquement basée sur le matriarcat, où les familles sont organisées autour des femmes, véritables piliers de notre société.
Le code de la famille mis en place à l'indépendance, était un des codes les plus avancés d'Afrique qui n'avait rien à envier aux pays les plus développés ; il a été remis en question dans le but de reléguer la femme au second plan.
Aujourd'hui, au Mali, en espace rural comme en ville, la femme a bien des défis à relever mais elle se rend compte aussi de sa force d'un point de vue électoral, en tant qu'électrice mais aussi parce qu'elle peut être éligible et élue. Lors des campagnes électorales, ce sont une fois encore les femmes qui se mobilisent pour appeler à voter. Hélas, pour les élections présidentielles, organisées en 2013 à la demande de la France, comme des milliers de jeunes Maliens, je n'ai pas pu voter tout simplement parce que ma carte d'électeur n'était pas prête. »
Hawa Deme
Dans le cadre de la journée internationale des femmes, le Mouvement de la Paix et l'ADEM proposaient le 15 mars à Rennes un temps d'échange intitulé « Femmes Africaines debout » au cours duquel des femmes venues du Congo, de Centrafrique, d'Algérie et du Mali ont pu témoigner.