On se repère aux poussettes en entrant dans les locaux de la mairie de quartier. Dans un coin de la salle : un tapis de jeux ; aux murs : des ballons multicolores. On annonce au micro qu'on peut réchauffer biberons et petits pots dans la cuisine et qu'une table à langer est installée dans les toilettes... L'ambiance n'est ni à la conférence, ni au débat ; plutôt au repas de famille.
Et c'est bien de familles dont il est question justement. De celles qui ont choisi de vivre la naissance d'un enfant dans une sorte de parenthèse, un espace dédié au bien-être et à l'écoute des parents comme des bébés.
A Rennes, la maison de naissance de la Sagesse fête son premier anniversaire.
« Sachez que vous changez la vie de nombreuses familles à jamais ». Cette phrase, en exergue du diaporama de présentation, est signée d'un couple dont le bébé gazouille en ce samedi 17 mars. On célèbre le premier anniversaire de Parent'eizh, un lieu pas comme les autres, adossé à la clinique de la Sagesse où plus de 200 enfants ont vu le jour entre fin mai 2017 et fin février 2018.
C'est début 2017 en effet qu'une structure inédite et à ce jour unique en France a ouvert ses portes à Rennes. Elue, responsables de l'association Maisoùnaiton, professionnelles de santé, parents... celles et ceux qui ont répondu présents à cette invitation l'ont tou-te-s redit : « il faut remercier l'équipe responsable de la Sagesse d'avoir osé se lancer dans ce projet ». Au sein même de l'établissement, est donc proposé aux futurs parents un accompagnement spécifique pour une naissance physiologique chaque fois que cette solution « la plus naturelle possible » est concevable. En cas de complications, les mamans et leurs bébés n'ont qu'un couloir à traverser pour être pris en charge dans les unités médicales. Il s'agit rappelle, Christiane David, « de deux quartiers du même village ».
« Vous êtes nos sages-fées »
« Accoucher dans cette filière est une véritable chance » témoigne Caroline, jeune maman, qui souhaite que d'autres femmes fassent l'expérience qu'une naissance n'est pas d'abord et avant tout un acte médical. Au bout de quelques mois, elle conserve le souvenir « d'une douche d'émotions » bien sûr mais aussi de « bienveillance, de réconfort et de... tisane de framboise ». Elle estime à travers son accouchement « avoir appris énormément » sur elle-même, sur son corps et les ressources qu'il recèle et avoir « gagné en estime de soi ». « Vous êtes - dit-elle encore aux professionnelles présentes – nos sages-fées, vous êtes un membre de notre histoire ».
Beaucoup d'émotions donc dans ces retrouvailles au milieu des babillages et des ballons qui éclatent. « Je suis habitée par tout ce chemin parcouru » confie pour sa part Christiane David qui fait figure de référence dans cette aventure.
Pendant plus de quatorze ans, avec des collègues sages-femmes et des parents, elle a porté le projet au sein de l'association Maisoùnaiton, se sentant « bousculée dans une pratique bien installée où la technique allait bon train » par les demandes de futurs parents désireux d'écrire leur histoire autrement. « Dans l'uniformité des modes de vie et de pensée, les gens dont vous faites partie déroutent, obligent à regarder autrement » dit-elle encore.
« Merci de nous avoir fait confiance »
Pour cette « aventure si belle et si folle », c'est toute une équipe de sages-femmes qui s'est impliquée et s'impliquent encore chaque jour (et chaque nuit). A l'image de celles qui sont venues apporter elles aussi leurs témoignages. « C'est émouvant pour nous de voir tous ces petits bouts qui poussent - disent-elles – merci de nous avoir fait confiance ». Des remerciements auxquels répondent les parents. « Les patients ne sont pas ceux qui reçoivent les soins et les praticiens ceux qui les procurent » explique Jérémie, jeune papa, heureux d'avoir été « actif » lors de la naissance de son enfant.
S'il se posait beaucoup de questions sur le rôle et l'utilité du père lors de l'accouchement, il a désormais les réponses : « créer une atmosphère de sécurité autour de la mère, la préserver ». « A Parent'eizh, on se sent un peu chez nous – dit-il encore – les sages-femmes y sont comme des guides éclairés qui apportent leurs conseils pour révéler les ressources cachées » que chaque femme possède au moment de la naissance de son enfant.
Et toutes et tous de s'accorder sur un seul et même vœu : que nombreux soient les couples à vivre ainsi la naissance de leurs enfants et que « la filière fasse elle aussi de nombreux bébés » !
Geneviève ROY